mercredi 28 novembre 2018

Les démagos montent au créneau

Et si l'Elysée et Matignon étaient bientôt à eux,

Depuis 18 mois, les bonnes vieilles oppositions (au sens propre comme au figuré), de gauche comme de droite, peinaient à se faire entendre, groggy depuis qu’une masse indifférenciée de jouvenceaux issue de la République En Marche leur avait scandaleusement piqué leurs fauteuils de notables à l’Assemblée. Mais la vengeance étant un plat qui se mange froid, les usurpateurs du pouvoir ne perdraient rien pour attendre.

Pour quoi? Pour qui?
Et voilà qu’une jacquerie sourd dans les territoires lointains, arborant un gilet jaune et des slogans tous azimuts dont la suppression des taxes sur le carburant. Enfin, l’occasion rêvée de se refaire une santé. Pour les Wauquiez, Dupont-Aignan, Le Pen et autres Ruffin (Mélenchon étant symboliquement mort le 16 octobre avec les hirondelles), il y a enfin du grain à moudre. Ces gens qui n’ont jamais eu que de  la condescendance pour les ploucs, les provinciaux bas du front, les « hillbillies » attachés à leur l’arbre, trop bouseux pour intégrer la société urbanisée, connectée et intello-bobo dont eux-mêmes sont les plus dignes représentants, les voilà qui s’empressent de récupérer à leur profit la protestation.  Monsieur Wauquiez se pare d'un gilet jaune pour faire peuple, lui, le rejeton le plus significatif de l’élite énarchique ; Monsieur Dupont-Aignan récupère le mouvement en jouant au prince qui jette des pièces d’argent aux manants par la fenêtre de son carrosse ; Madame Marine Le Pen compte les points en buvant du petit lait comme si on avait oublié un fameux débat au cours duquel elle a fait preuve d’une incompétence crasse en matière de projet politique ; Madame Marion Maréchal, qui elle, s’est mêlée sur les Champs Elysées à ses amis de l’ultra-droite, n’a pas assez de mots pour vilipender la catastrophe démocratique, posant les jalons de son projet d’installer un régime autoritaire pour lequel elle peut imaginer que les Français seront bientôt murs. Reste Monsieur Ruffin, expert en misérabilisme, citant l’éternel exemple de l’assistante maternelle qui travaille 60 heures par semaine pour 800 Euros mensuels ou de la retraitée qui gagne 500 Euros par mois alors que le minimum vieillesse s’élève à 803 Euros, fake news ! Nous voyons bien que tous ces "people" ne sont que des opportunistes, surfant sur les mécontentements pour en tirer les ficelles à leur bénéfice. Reste François Hollande, le champion de la reculade, le roi de l’atermoiement. Il joue les innocents omettant de rappeler que la mise en place de la Taxe Carbone, c’est lui. Mais en fin refileur de patate chaude, il s’est arrangé pour que ce soit sous son successeur qu'elle soit appliquée. Malinx, le lynx!

Les inventeurs de la Taxe Carbone
En 2009, ça paraissait loin. Sauf qu'on y est arrivé

Maintenant, Mesdames et Messieurs les Gilets Jaunes, prenez garde à ne pas vous laisser embarquer dans des projets radicaux visant à ébranler les fondements de la République. Il y en a qui ont bien compris qu’ils pourront aisément vous manipuler du fait de votre manque d’expérience politique. Votre louable sincérité et votre ignorance des arcanes du monde politique vous rendent perméables aux slogans bien rodés des agitateurs professionnels, complotistes, activistes de la fachosphère ou issus de l’ultra-gauche staliniste. On constate déjà que le mouvement s’éloigne de ses revendications d’origine pour chercher à renverser le régime, réclamant l’ « impeachment » du président et la dissolution de l’Assemblée Nationale. 

De là, la mise en place de nouvelles élections et la victoire promise au Rassemblement National ou aux Républicains. Mais pour quelle politique ? Une chasse musclée aux migrants (tiens, c’est bizarre, on n’en parle plus de ces indésirables) ; la suppression des taxes sur le carburant qui sera remplacée par une hausse de 2% de la TVA, plus juste en effet (une promesse du programme Fillon) ; le retour aux 90 km/ h sur les départementales (un coup de pouce à la mortalité routière) ; l’abandon de la hausse du tabac ; le maintien de la centrale de Fessenheim et des centrales à charbon, la réduction du programme éolien (celui-ci défigurant le paysage) ; le retour de l’ISF (oui si c’est le RN, non si ce sont les Républicains) pour faire plaisir à ceux qui ne payent pas d’impôt mais qui aiment bien que les autres en payent; le retour des emplois aidés (pas sur du tout) ; la suppression des allocations familiales pour les immigrés (même s’ils cotisent), la suppression de l’AME ; la suppression de 100 000 fonctionnaires à l’année (programme Fillon), comme ça, à l'arrache : 'toi là-bas, dehors! toi aussi, dehors! Fired! Fired! Fired!', quel plaisir, tous ces gens virés ; le dépassement obligatoire des 3% de déficit annuel (RN) et pour corollaire la remise en cause de la contribution de la France à l’Union Européenne ; des mesures urgentes pour la hausse du pouvoir d’achat, soit la suppression de l’augmentation de la CSG, le retour de la Taxe d’Habitation, la réindexation des retraites sur le coût de la vie, et pour le Noël des enfants, un chèque sans provision ; pour l écologie, "quoi ! l’écologie, elle nous emmerde l’écologie, c’est un truc de riches pour faire payer les pauvres", donc rien. 

Au final, peu de choses, pas de baisse des charges, pas de baisses des impôts, pas de relance économique, des chômeurs en moins mais pour des emplois pris en charge par l’Etat et payés par des caisses vides, la France de Hollande puissance 10. Et pour conclure, un creusement de la dette et une nouvelle patate chaude adressée de la génération d’après. A quoi cela sert-il de parler vrai lorsqu’on accorde plus de crédit au mensonge.

Macron a hérité d’un pays qui s’est fourvoyé depuis des décennies dans une impasse, se voilant le visage dans l’espoir d’improbables lendemains qui chantent. On navigue à présent dans un populisme assumé, marchant tout droit vers l'instauration d'un régime fort, contre lequel toute opposition sera qualifiée de séditieuse. Cela a fonctionné un temps au siècle dernier, mais l'illusion n'a tenu qu'un moment. Souhaite-t-on refaire le film des années brunes? Il est, en revanche, étrange que le monde désenclavé d’aujourd’hui et la mondialisation sauvage que nous dénonçons tous ne nous interpellent pas davantage, dès lors qu'il s'agit de remplir les caddies de produits à bas prix, venus de pays où règnent l’exploitation des enfants et la misère sociale. Mais la plupart de nos concitoyens ne sait même pas ce que c’est que payer des impôts. Vous voulez du pouvoir d’achat, prenez-vous en Sarkozy et Hollande, c’est au cours de leur quinquennat que celui-ci a baissé de façon drastique.

Gilets Jaunes, acte V
"Marion Maréchal, nous voilà !"
Les démagos ont le vent en poupe, très bien, qu’ils viennent au pouvoir puisque c’est ce que les Français réclament. Mais lorsque le pays sera vraiment au fond du trou, que ces gens qui savent si bien geindre sans sortir les mains de leur poche, ne viennent pas dire « quand la bise sera venu » qu’ils ne savaient pas.

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