mardi 27 novembre 2018

Gilets Jaunes, de l'état de grâce à la disgrâce?

Elle est passée où la taxe sur le carburant


Ce qui devait arriver arriva. Monter à Paris était un pari à haut risque. Conscient des débordements qu’engendrerait inévitablement la mobilisation désordonnée des Gilets Jaunes, le Ministère de l’Intérieur leur avait proposé de se regrouper sur le Champ de Mars, un vaste espace sécurisé où tout aurait pu se passer dans une atmosphère de kermesse. Craignant d’être parqués comme des animaux, les Gilets Jaunes ont décliné l’offre, désirant s’en prendre aux édifices institutionnels et principalement l’Elysée pour en déloger le Président. Comme on a pu le lire sur des pancartes, le but étant de le conduire au pilori. Au cri de Macron démission ou Macron Casse-toi et Macron en prison, les plus radicaux ont investi les Champs Elysées malgré les vives recommandations de la Préfecture de Police. Comme prévu, ils ont été noyautés par les groupuscules extrêmistes, experts en guerilla urbaine et destructions en tout genre. Tout s’est achevé dans le chaos qu’espéraient visiblement certains ténors politiques, prompts à récupérer le mouvement sans se salir les mains, pour asséner leurs coups sur le dos du gouvernement et souffler un peu plus sur les braises d’un pays qui se consume depuis 30 ans.

En conclusion, ceux qui, ce dernier samedi, sont restés en Province, toujours très nombreux comme les 3000 manifestants qui ont défilé pacifiquement dans la seule ville de Narbonne n’ont malheureusement pas réussi à masquer les 8000 porteurs de gilets jaunes qui se sont répandus dans la confusion à Paris, contraints, en raison leur signe distinctif, de cautionner les casseurs camouflés sous leurs couleurs, quitte à se voir discrédités. Pourquoi ces malheureux provinciaux ont-ils été aussi mal informés du danger. Ils croyaient peut-être échapper, grâce au soutien populaire dont ils bénéficiaient depuis une semaine, à la venue intempestive de ces éléments violents qui avaient déjà pourri par leurs exactions la plupart des manifestations parisiennes de cette année. C’est raté.

Un message écologiste radical. Tutoiement de rigueur
Moustache à la gauloise ou à la Staline?

Le mouvement des Gilets Jaunes est en passe de perdre de son crédit, faute de se structurer et de se donner une vraie représentation avec des propositions cohérentes. Voulant à tout prix rester dans la spontanéité et l’imprévisible, ils se sont laissé infiltrer par des gens beaucoup plus radicaux dans leurs choix politiques, formés à un discours sans équivoque sur leurs buts. Leurs slogans : démission de Macron et de son gouvernement, dissolution de l’Assemblée Nationale, référendum sur la sortie de l’Union Européenne, accessoirement suppression des taxes sur le carburant et rétablissement de la taxe d’habitation.
Emmanuel Macron n’a pas à démissionner. Le pouvoir des urnes a une légitimité que n’a pas le pouvoir de la rue. La démocratie exige d’attendre les élections. Donc, patience. On a le sentiment que ceux qui se revendiquent du peuple n’attendent plus de leurs gouvernants que du pain et des jeux, comme du temps des empereurs romains. Est-ce bien raisonnable ?

Bien sûr qu’on entend, çà et là, pas mal de Gilets Jaunes se revendiquer de Marine ou mieux, de Marion, assurant qu’avec l’une ou l’autre , ça irait d’un coup beaucoup mieux. On est sur, au moins, qu’il n’y aurait plus de manifestations. Mais on n’en est pas encore là. En ce qui concerne le gouvernement actuel, il ne peut être question d’abandonner un chantier en cours. C’est ce qui a été reproché à François Hollande avec l’écotaxe, une reculade pour ne pas dire une couardise qui lui a coûté sa réélection.

Reste à savoir pourquoi un tel mouvement et maintenant. La surfiscalité n’est pas un fait nouveau, elle est endémique, structurelle, liée au choix de société de la France elle-même, celle de la prise en charge par l’Etat de toute la charge sociale. Cette charge n’étant pas une variable, cet aux citoyens de l’assumer, c’est-à-dire de participer à son financement à hauteur de 60% de leurs revenus, en moyenne, que ce soit en cotisations, impôts et taxes de tous ordres. Les taxes sur les carburants ont été, entend-on, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, certes, mais ce n’est qu’une goutte d’eau. Prélever cette goutte d’eau du vase ne changera en fait pas grand-chose. Tout comme la démission du gouvernement si elle devait avoir lieu. Changer les femmes et les hommes qui gouvernent simplement pour voir à leur place revenir des têtes anciennes ne servira à rien si l’on n’achève pas les réformes nécessaires pour enrayer le puits sans fond que constitue la dette. Souvenons-nous qu’il y a un an et demi, Emmanuel Macron a été élu sur un projet qui englobait la fin progressive de la taxe d’habitation, la hausse de la CSG sur les retraites, la baisse des charges sur les salaires, la réforme du Droit du Travail et la mise en place de la taxe carbone dans le cadre de la transition écologique. Peut-être eut-il dû renoncer à son programme, à l’instar de ses prédécesseurs une fois élu. Mais on l’a justement choisi parce qu’on lui faisait confiance pour tenir ses promesses de campagne, tant on avait reproché à ceux avant lui d’avoir méprisé leurs électeurs en oubliant purement et simplement leurs beaux discours de campagne. Faut-il y voir une forme de schizophrénie à la française.

Que Macron s'en aille. Le reste, on s'en fout

Attention aussi à la démagogie. Dans la situation financière sous perfusion à laquelle s’est habituée la France depuis bien longtemps, la suppression des taxes + la hausse du pouvoir d’achat + la revalorisation du SMIC + l’augmentation massive des retraites vont mettre le pays dans le rouge vif et lui faire perdre toute crédibilité auprès des organismes prêteurs. Beaucoup d’analystes estiment qu’il suffirait de peu de choses pour que la France plonge comme l’a fait la Grèce il y a 10 ans. Une telle perspective serait cataclysmique. Faudrait-il alors restaurer l’ISF ? C’est aux riches de payer, c'est aux qui ont l'argent ! L’idée revient dès que se profile une crise. Les riches ayant les moyens d’être malins, n’ont pas attendu pour se soustraire à l’impôt sur la fortune de déplacer cette fortune ailleurs, là où ils peuvent la faire prospérer en toute tranquillité. On entend aussi les politiques parler des milliards de l’évasion fiscale. Là encore, ceux qui ont les moyens de dissimuler leur fortune à l’étranger sont assez malins pour réaliser les montages qui leur permettront d’échapper aux poursuites. On ferait mieux de se demander pourquoi les gens fortunés veulent échapper au fisc. Tout simplement parce que comme tout un chacun, ils préfèrent le paradis à l’enfer. Et la France est en matière fiscale plus qu’un enfer, c’est effectivement l’Enfer. Mais cela fait bien longtemps que c'est comme ça.

Petit papa Noël, apporte nous des joujoux par milliers
Et à la fin, c'est la Chine qui gagne
La solution serait de produire plus de richesses. Plus facile à dire qu’à faire. On a, peu à peu, démentelé l'outil de production, fermé la petite industrie, déménagé à l’étranger la grande industrie et détricoté, par facilité, le tissu artisanal local et piétiné son précieux savoir-faire pour ne conserver que les services, le commerce et le chômage indemnisé. Sans oublier une fonction publique pléthorique et peu productive. On importe tout le temps plus qu’on exporte et le pouvoir d’achat se dissout dans une masse de biens venus de l’étranger. On le dit en souriant mais une bonne partie de nos salaires part dans des achats fabriqués en Chine. C’est au final dans les poches d’un patron chinois multimilliardaire qu’atterrit l’argent des Français. La période de Noël qui arrive en sera une fois encore la plus parfaite illustration.

En conclusion, chers Gilets Jaunes, la confrontation à ses limites. La raison veut que l’on se mettre autour d’une table et que l’on discute. C’est toujours mieux que de se taper dessus et de tomber en disgrâce. La balle est dans le camp du gouvernement, c’est le bon moment.

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