Les Français ont la mémoire courte, c’est vérifié. Mais le
problème est que doués d’une cervelle de poisson rouge, ils s’en vont en guerre
avec force fracas contre la hausse d’un prix qu’ils jugent inacceptable à leurs
yeux, oubliant ou mieux ignorant que cette même mesure s’était produite plus de
dix ans plus tôt avec des prix similaires. A l’époque, nulle manifestation,
uniquement de la résignation.
Il y a onze ans, la France fêtant l’avènement de son nouveau héros Nicolas Sarkozy, acceptait le dos courbé le tragique destin qui lui
était annoncé au travers d’une hausse jugée inéluctable du pétrole. Les esprits
les plus informés voyaient déjà un prix du carburant à 2 euros le litre et tout
le monde se préparait en toute résignation à cette fatalité.
Or, les résignés d’hier sont devenus les révoltés
d'aujourd’hui. Ce qu’on acceptait alors par fatalisme ne passe plus en 2018.
Force est de reconnaître que le registre dans lequel on évolue à présent est
très éloigné des motivations de la décennie passée. Et pourtant, le budget
carburant était bien plus élevé il y a 40 ans, à une époque où les voitures
consommaient davantage. Alors que dire ? La Chine nous envoie des T-shirts
et des robes à des prix beaucoup moins élevés que ce que nous payions il y a
trente ans. Personne pour s’en plaindre même s’il a fallu pour économiser ces
quelques Euros sacrifier toute notre industrie textile et créer du chômage et encore du chômage. On a compensé, on a indemnisé, on a taxé ceux qui avaient encore la
chance de conserver leur emploi pour venir au secours de ceux qu’on avait
sacrifié. La France est devenue au fil des ans une formidable association
charitable avec pour mission d’atténuer les effets funestes d’une situation économique
désastreuse qu’elle n’avait pas vu venir, obsédée par la défense à outrance de
services publics ultra-onéreux mais hyper-protégés au détriment de millions de
travailleurs des secteurs dits marchands, sacrifiés sur l’autel de la
concurrence, ce terme honnis par les tenants d’un marxisme devenu obsolète mais dont l’Education Nationale regorge encore,
vouant aux gémonies la simple idée de confier le moindre destin de ses ouailles
à une horde d’exploiteurs et d’esclavagistes.
Notre pays n’est pas réformable,
comme l’a reconnu notre président, et il a tragiquement raison. Car il va dans
le mur, poussé dans le dos par une bande de syndicalistes nostalgiques de l’Union
Soviétique qui n’existent encore que parce que la France est une démocratie de
type voltairienne, respectueuse de ceux qui s’opposent à elle. Gageons que ces
mêmes syndicats arrivés au pouvoir et soutiens désignés d’un régime autoritaire
plus conforme à leur vision collectiviste de la société tiendront leur heure
venue un discours radicalement opposé. Français réveillez-vous, vous avez donc
tellement envie de vivre comme à Cuba et Caracas. L’Europe vous déplaît à ce point que vous ayez envie de vous vautrer dans les illusions d’un nationalisme vain
et stérile, dont la promesse de lendemains qui chantent se traduirait par des
crises si terribles qu’elles entraîneraient le pays dans une guerre civile
sanglante, guerre de religions ou de petits intérêts corporatistes, révélateurs
exacerbés des haines cumulées depuis trop d’années que la déraison et la
stupidité (la bêtise des hommes dixit Emmanuel Macron) dont la cantine des
réseaux sociaux a fait son menu.
En conclusion, aux gilets jaunes opposons plutôt les gilets
verts écolo ou plus simplement l’esprit patriotique. Derrière ce mouvement
spontané des gilets jaunes, le Rassemblement National a bien compris qu’il
pourrait s’en servir pour attiser les divisions et générer du désordre sans
passer pour des « fachos », bien joué.
Bien sûr, nous voulons préserver nos retraites, mieux aider nos
handicapés, nos veuves, nos chômeurs, nos jeunes, préserver nos services
publics (même s’ils nous coûtent un bras voire les deux comme les milliards
perdus de la SNCF), nos I-phone même s’ils saignent nos comptes en banque, nos
box internet, etc….. etc…., mais nous ne nous reconnaissons ni dans les revendications
par trop corporatistes des bonnets rouges ni dans les excès rageurs de l’ultra
gauche stalinienne. Le verdict est, en revanche, assez clair. Entre les pathétiques arguties des pieds nickelés des
LR, creuses et insipides, entre l’opportunisme paradoxal d’une Marine Le Pen déambulant à Verdun, à la recherche dérisoire de l’ombre d’une victoire dans ce qui ne fut qu'une indicible
boucherie, faisant même fi de la volonté de De Gaulle et Adenauer de mettre un
terme définitif à cette compétition mortifère et contre nature que furent les deux guerres entre l'Allemagne et la France, le chemin d'une paix durable est de plus en plus parsemé d'embûches.
Les nationalismes ne sont en fait qu’un dévoiement des
patriotismes, s’affirmant comme des vecteurs de haine et d’égoïsme revanchard, des
recycleurs d’idéologies perverties, des excitateurs de vieilles rancœurs et de basses
jalousies. Dans ce nouveau monde au bord de la mobilisation générale, prêt à se
choisir des dictateurs et renier ses libertés au nom de fantasmes sécuritaires,
le combat isolé du chef de l’Etat fait en ce moment sourire la presse de tous
bords. On se moque de sa démarche solitaire, préférant surfer sur la popularité
de la vague populiste. Prenons garde, nous sommes parvenus au crépuscule des
années folles, aveuglés par l’image hédoniste que nous renvoie nos selfies. Il
ne faudra surtout pas dire, lorsque la chape de plomb s'abattra sur nos
démocraties sous la férule des régimes militarisés et liberticides que nous ne savions pas.
La marche en avant de l’histoire ? Non, juste un sacré retour de bâton. Amis gilets jaunes, vous ne savez pas de quoi vous êtes l'enjeu.
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