dimanche 19 mai 2019

RN : la stratégie payante du ver dans le fruit


Je me souviens qu’il y a deux ans, durant la campagne présidentielle, le bâtiment du Front National qui jouxte à Trèbes le pont enjambant l’Aude arborait fièrement un immense drapeau de la Fédération de Russie. C’était l’époque où Marine Le Pen venait d’être gentiment éconduite par Donald Trump et s’était rabattue sur Moscou où Vladimir Poutine l’avait poliment reçu dans ses bureaux du Kremlin. Un service qui en vaudrait un autre.

Le drapeau de la milice du Dopnbass flotte
sue les Champs-Elysées
Une vision plus convenable de l'Europe
selon le RN
Quel paradoxe pour la candidate frontiste qui n'avait de cesse de ressasser tout le mal qu’elle pensait de l’Union Européenne et du pouvoir quasi-dictatorial de sa commission, que ce soudain besoin d’inviter la Russie à une élection totalement française. C'était pour elle l'époque du Frexit, celle aussi de la sortie de l'Euro. Deux ans plus tard, on ne parle plus de quitter l'Europe, ni même l'Euro. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, direz-vous, mais tout de même. Ce virage à 180° laisse penser que ce n'est pas un simple effet du hasard mais plutôt le fruit de petits arrangements entre amis. La poignée de main de M.Poutine vaut bien une entorse à la règle.
Et puis, l'amitié franco-russe est une longue histoire, alors!  Renouer avec la Russie raviverait même des souvenirs attendris. On disait jadis du Parti Communiste qu’il était l’œil de Moscou. Ce n’est un secret pour personne qu’une large  majorité de communistes s’est depuis tournée vers le Rassemblement National parce qu'il est, selon eux, le seul parti leur permettant de cultiver la nostalgie du bon vieux temps où tout partait de la Place Rouge.   

On a soupçonné des officines russes d’avoir trollé et influencé les Présidentielles américaines, dans le but de favoriser l’élection de Donald Trump. On a par la suite découvert que de mystérieux comptes Facebook et Twitter venus de Russie s’étaient immiscées dans la campagne française dans le but de discréditer Emmanuel Macron en propageant des fake-news. On ne pouvait s’attendre à moins après que Vladimir Poutine eût déclaré, même du bout des lèvres, son soutien à Marine Le Pen. Rien de plus normal, en fait, tant la volonté affichée de la présidente du FN de sortir de l’Union Européenne, était de nature à satisfaire au premier degré les intérêts russes.

Peu en verve dès qu’elle a affaire à meilleur qu’elle, Mme Le Pen a essuyé un cuisant revers lors la première manche. Elle aurait logiquement du s'effacer mais dans un système dynastique telle qu'énoncé par le patriarche, la légitimité seigneuriale a régénéré l'héritière à la veille des Européennes. Elle compte bien ne pas décevoir son ami Vladimir en devenant pour lui le ver dans le fruit d’une Union qu'elle ne veut plus quitter pour mieux la faire imploser. Une bonne nouvelle, enfin, pour le Kremlin condamné jusque là soutenir des régimes sans réelle légitimité, voire aucune.
Cette proximité avec le leader russe n’est, en revanche, pas vraiment du goût des populistes des anciens pays d’Europe de l’Est qui ont trop souffert de la botte soviétique pour être tentés de renouer avec Moscou. Tous farouches partisans de l’OTAN, ils se méfient ce cette Française dont ils se demandent si elle est la marionnette de Poutine ou sa créature.

Marine Le Pen adore se montrer à la tribune autant pour y défendre ses positions anti-migratoires que pour s'y faire photographier avec ses amis nationalistes. Qu'on ne s'y trompe pas, il s'agit d'abord pour elle d'entretenir son fonds de commerce, cette France du « c’était mieux avant De Gaulle» à qui elle fait avaler toutes les couleuvres qu’elle veut, parvenant même à lui faire croire qu’elle possède une réelle stature européenne. Les ultra-droites ne se bousculent pourtant pas en Europe pour la soutenir, primo parce que les dérives verbales de son père laissent toujours un arrière-goût de vomis et, secundo parce qu’elle est sous le coup d’une mise en examen pour avoir rémunéré des emplois fictifs à l'aide des fonds alloués par l'Europe. Fictive, telle est bien la présence du Rassemblement National à Bruxelles. L’abstention ou le refus sont les seules signatures de son inaction. Jamais une proposition mais, en revanche, une opposition systématique à tout, même aux projets de loi proches de son programme. Si les nombreux députés européens du Front National avaient été payés en fonction de leur travail au Parlement, ils auraient tous fini aux ronds-points de la cité strasbourgeoise à faire la manche. 

Les élus du Rassemblement National ne s’intéressent qu’à la gamelle que leur remplit généreusement l’Europe. Ils escroquent effrontément les électeurs français mais, étonnamment peu regardants dès qu’il s’agît de Mme Le Pen, ceux-ci en redemandent. Ses amis, pris la main dans le sac en train de négocier en cachette avec le devenu incontournable Steve Bannon, des financements venus d’on ne sait où, elle annonce avec pertes et fracas qu’elle va porter plainte pour diffamation. Et le tour est joué, de plainte il n’y en aura jamais, aussitôt révélée, l’affaire a été enterrée.

Le signe du White Power
Le dernier symbole en date des suprémacistes
Marine Le Pen est la seule qui ne sait pas
ce que le geste signifie. C'est c'là oui!
"Je n'étais pas au courant". D'autres l'ont dit avant elle après
que le pire fût arrivé
Mieux encore, elle apparaît en compagnie d’un leader de l’extrême-droite estonienne en train de faire le signe de ralliement des suprémacistes blancs, un message fort explicite qu’elle réfute lorsqu’on l’interroge, prétendant qu’elle ne sait pas ce que le geste signifie; ignare avec ça. Et on la croit. Son équipe et elle balancent à tour de bras de la fake news à toutes les sauces tandis qu’elle met en doute les faits avérés mettant en cause ses relations sous prétexte qu’elle n’a pas entendu la même chose ou qu’elle n’a pas vérifié. Et bien sûr, on ne dit rien. On a l’étrange sentiment d'une formidable complaisance à son égard. Elle fait ce qu’elle veut, dit ce qu’elle veut et tout le monde se tait face à elle par peur de futures représailles. On en est déjà là.

La course-en-tête des nationaux-populistes fait surtout un jaloux du côté des bolivariens.  Jean-Luc Mélenchon force à présent les portes de l’arène, brocardant, comme à l’habitude, l’ultra-libéralisme des USA, sa bête noire qu'il appelle dédaigneusement l'Empire de peur de s'écorcher la bouche, et surtout son bras armé l’OTAN. Le voilà qui veut montrer que c’est lui le véritable ami du Tsar Vladimir, se faisant même l’ambassadeur autoproclamé du Kremlin en condamnant ouvertement la Georgie qui devrait prochainement intégrer l’OTAN et renier irrévérencieusement son statut obligé de satellite de la Russie. Il s’est, fort heureusement, fait sèchement remettre à sa place par la présidente georgienne pour ingérence déplacée dans les affaires intérieures d’un pays souverain. 
Contrairement à Le Pen, il n’a rien à perdre en Europe où il représente vraiment peu mais c’est à son électorat qu’il s’adresse, cherchant le coup d’éclat qui lui permette de recoller au trio de tête. Il a perdu la moitié de ses soutiens en deux ans, il y a plus que jamais le feu dans la maison.

Mélenchon et Le Pen veulent une Europe à leur image, ne l’imaginant pas autrement que comme une grande France ou rien du tout. Ils n’ont, pour cela, pas de mots assez durs pour l’Allemagne, lui reprochant sa réussite, le rendant même responsable du déclin industriel de la France. Les deux la désignent aussi comme coupable de tout faire pour préserver ses exportations de voitures à travers le monde, au point d’y sacrifier l’Union Européenne. Il est vrai que la construction automobile outre-Rhin a été faiblement délocalisée et qu’elle constitue pour l’Allemagne un domaine fortement mobilisateur en main d’œuvre. Le problème est autrement différent pour Renault et PSA qui ont supprimé énormément d’emplois en France pour développer des unités de fabrications dans des pays dont les coûts de production n’ont rien à voir avec ce qu’ils sont ici, notamment. En faut-il pour autant blâmer l’Allemagne en raison de son patriotisme économique alors que c’est uniquement le coût exorbitant de la politique sociale que la France impose à ses entreprises qui a conduit les fabricants du secteur’automobile, mais pas qu’eux, à chercher ailleurs les solutions pour continuer d’exister. Le naufrage de notre industrie textile a, en cela, servi de leçon.

Et alors? Les banques françaises ne prêtent pas. Il faut bien aller chercher
l'argent ailleurs
Marine Le Pen, agente du KGB ? Cela peut faire sourire mais il ne fait aucun doute que ce qualificatif est de nature à lui convenir même si le service de renseignements soviétique qui a fait les chaudes heures de la Guerre Froide s’appelle aujourd’hui le FSB.

La détestation de Marine Le Pen pour l’Union Européenne ne s’arrête cependant pas là. Doutant peut-être de l’infaillibilité du soutien de Moscou, elle s’est liée d’amitié, même si elle le conteste aujourd'hui, avec Steve Bannon, ex-directeur de campagne de Donald Trump, poussé à la démission suite à son soutien controversé en faveur de l’extrême-droite américaine. Catholique revendiqué, obsédé par le risque de submersion migratoire et la théorie du Grand Remplacement, conservateur illibéral, Bannon a quitté les Etats-Unis pour faire de l’Europe son nouveau territoire de chasse. Populiste convaincu, il a fait du nationalisme intégral sa doctrine. Marine Le Pen le considérait,il y encore peu, comme un ami, espérant peut-être compenser à travers cette relation le camouflet que Donald Trump lui avait infligé en l’ignorant délibérément lorsqu’elle avait fait spécialement le voyage à New-York dans l’espoir d’y être adoubée par ses soins.

Cette mission,si vous l'acceptez consistera à vous allier
avec Marine Le Pen et à la placer en tête aux élections européennes.
Nous pourrons ensuite démanteler cette union de
l'intérieur et faire triompher nos idées.
Vous disposerez de tous les moyens pour réussir cette
opération
Jean-Luc Mélenchon voit rouge (une vieille habitude) quand on lui parle de Steve Bannon mais il sait aussi très bien que la volonté de l’ancien conseiller de Donald Trump d’anéantir l’Union Européenne est de nature à servir les intérêts de Vladimir Poutine auquel il a fait allégeance.
Pour preuve, la défection d’Andrea Kotarac, un élu symbolique de la France Insoumise parti rejoindre le Rassemblement National. Le coup a été bien monté, prouvant s’il en est les passerelles qui peuvent relier ces deux mouvements tant ils sont dominés par leurs calculs politiciens. C'est avec une bonne dose d'opportunisme autant que de cynisme  qu'ils ont, tous deux, voulu faire d’une élection à l’échelle d’un continent un Référendum franco-franchouillard pour ou contre le Président de la République, allant même jusqu’à avoir l’outrecuidance de se poser comme les vrais maîtres du pays en exigeant son départ s’il n’arrive pas en tête. Ce que Marine veut, Dieu le veut. Si l’on suit ce raisonnement, les deux boutefeu auraient dû l'un et l'autre quitter la scène après leur défaite respective. Or, ils sont toujours là, bien en place. La défaite rendrait, en somme, plus légitime que la victoire.

Jusqu'où peut-on marcher sur les plates-bandes de l'autre?
Tandis que le RN et LFI sont à qui fera le plus de courbettes à M. Poutine, détournant les enjeux de l’élection au Parlement Européen au profit d’un Référendum anti-Macron, un troisième larron compte les points du haut de la Cité Interdite. La Chine avance patiemment ses pions espérant que la désunion européenne lui permette de tirer profit des faiblesses de chaque état. Xi-Jinping a bien compris que le trio Juncker-Merkel- Macron qui l’a accueilli lors de son récent séjour en Europe a la dent bien plus dure que les Italiens et les Grecs qui, pris à part, ne peuvent réprimer une faiblesse pour le parfum du thé au jasmin et la saveur aigre-douce du canard laqué. L’Europe des Nations que défend le Rassemblement National est, en fait, tout ce que demande Pékin pour mieux faire de ce continent sa cour de jeux. Dans le bras de fer qui oppose en ce moment Washington à l’Empire du Milieu au sujet d' Huawei, le nouveau leader mondial de la téléphonie numérique, l’Europe fragmentée apparaît comme le ventre mou. Avec plus de 500 millions de citoyens, tous des consommateurs aisés, l’Europe est la proie toute désignée pour satisfaire les appétits de l’ogre du Yang Tsé. Mais il faut surtout pour cela qu'elle négocie en ordre dispersé, une mission de choix pour les populistes.

L'Union Européenne : une dictature qui élit ses députés
à la proportionnelle intégrale! Insupportable!
On est au moins sur qu'avec les populistes, il n'y aura plus de parlement et
 plus d'élections. Ce sera la démocratie. Youpie!
L’Union Européenne est aujourd’hui la plus grande démocratie au monde même si ses détracteurs y voient une dictature de technocrates. Or, elle dispose d’un parlement élu au suffrage universel et qui plus est, à la proportionnelle intégrale, ce qui n’est tout-de-même pas rien. Une Europe des Nations n'aurait pour seul résultat que de détruire cette démocratie et de priver les peuples de leur droit de vote. C'est là toute la contradiction du Rassemblement National qui prétendant redonner le pouvoir au peuple veut, en fait, le confisquer à son unique profit. Quand, d'expérience, on connaît l'extrême-droite, on se demande qui aura les moyens de s'y opposer une fois qu'elle sera parvenue au pouvoir . Est-ce que nous accepterons de nous laisser déposséder de ce droit que nous a accordé l'Union Européenne en nous permettant d'élire nos représentants. Non! L'Europe fait aujourd'hui partie de nos gênes. Cela fait 60 ans que nous avons commencé à bâtir notre maison commune. Il n'est pas une seconde question de la dynamiter. Gilets Jaunes, Insoumis ou Lepenistes, l'Europe est un havre de paix dans un monde sous haute tension, que cela vous plaise ou non. Il suffit de voir ce qui se passe hors des frontières européennes pour comprendre tout ce qu'apporte l'union. De plus, tous les états qui la composent peuvent se féliciter de la hausse continue du niveau de vie de leurs citoyens et contrairement à ce que prétendent les nationaux-populistes, ce n’est pas la commission de Bruxelles qui gouverne; elle propose, certes, mais ce sont les états membres qui disposent. L’opprobre devrait en fait retomber sur les pays dont les dirigeants ont eu trop tendance à accuser l’Europe de turpitudes dont ils sont les seuls responsables. La France n’est pas exempte de reproches. C’est bien elle qui, depuis des années, accuse à tort Bruxelles de lui imposer des normes et des réglementations auxquelles la commission est étrangère. Les dégâts sont bel et bien là mais dites-moi que rien n'est perdu.  

C’est connu, on n’est jamais mieux trahi que par les siens.C'est bien là le problème. Maintenant, s'il y a des gogos qui croient que la France tirera sa force d'une Europe faible, ils mentent. Le mensonge fait partie de l'ADN de l'extrême-droite, c'est son mode de gouvernement. Et comme disait le Führer, "Plus le mensonge est gros, plus il prend", il avait raison. On s'en est juste rendu compte un peu trop tard.   

vendredi 17 mai 2019

Eurovision 2019 : L'Europe unie en chanson


Il est de bon ton, en France, de railler l’Eurovision, le grand raout annuel de la chanson auquel participent les Etats d’Europe, pratiquement tous les pays, largement au-delà de l‘Union Européenne. Le concours a lieu cet année à Tel-Aviv car comme le veut la tradition, c'est au pays vainqueur l'année précédente de recevoir l'année suivante. Certains ne manquent pas de marteler qu’Israël n’aurait rien à voir avec cet incontournable télé-crochet car il n’est pas en Europe. On ne va pas refaire l'histoire ni rappeler l'odyssée de l'Exodus mais sans tomber dans la géopolitique de comptoir, rappelons simplement qu'après des années d'atermoiements, Israël a été logiquement rattaché à l’Europe par la Fédération internationale de football et que personne n’y a trouvé à redire, au contraire. Nul ne peut contester, à part les mauvaises langues bien identifiés, qu'Israël a plus d'affinités culturelles avec l'Europe qu'avec son voisin saoudien. Cela fait, de toute façon 46 ans qu’Israël fait partie de l’Eurovision et qu’il en a été le lauréat à quatre reprises. Cette année, la polémique reprend, soutenue par des groupes islamo-gauchistes, toujours les mêmes, qui, au nom de l’antisionisme contestent inlassablement à Israël son droit d’exister et appellent au boycott. La politique ne peut donc jamais s’empêcher de jouer les rabat-joie en pourrissant à présent un des rares évènements consensuels et non sportifs qui rassemble  les citoyens de vieux continent devant leur écran dans une même communion festive.

La finale aura lieu demain soir 18 mai. Tous les pays n’y figureront pas après des demi-finales implacables qui ont notamment vu l’élimination de l’Irlande, la Belgique, le Portugal ou encore l’Autriche, par le passé brillants vainqueurs.
 Ils sont 26 pays à concourir en finale, du plus petit, Saint-Marin au plus grand, la Russie. Tout le monde, ici, pense aux chances de la France. La chanson « Comme un Roi » interprétée par Bilal Hassani ne remportera certainement pas le trophée (à moins que) tant la compétition est relevée mais la prestation sur scène du jeune chanteur est plutôt originale et porte bien le message selon lequel il faut d’abord s’accepter tel que l’on est. Il est possible qu’il intègre le top 10, c’est tout ce qu’on lui souhaite.

Alors, les paris sont engagés. Qui va l’emporter ?  L’Europe est déjà en ébullition et fait étrange, tous les Européens risquent de s’intéresser, pour une fois, à ce qui se passe chez leurs voisins.

Parmi les favoris se détachent le candidat hollandais Duncan Laurence avec sa chanson "Arcade", une prestation au piano très réussie et une orchestration tout en retenue, d’un classicisme d'où émane une indicible tristesse. Loin des paillettes et de la dance, c'est peut-être le style qui colle le mieux à l'air du temps La Suède aussi est classée parmi les prétendants avec John Lundvik et son titre « Too Late For Love », pour moi trop commercial et un tantinet dans la facilité. C’est aussi le cas de Malte avec Michela et son « Chameleon », là encore je ne suis pas vraiment emballé. Il y a également l’Islande, cette petite île aux volcans enneigés qui parvient toujours à sortir du lot. Grâce à un titre hard pop métal à tendance chaînes et cuir intitulé « Hatrio mun singa » interprété par le groupe Hatari, inutile de dire qu’il va y avoir du « lourd ». L’Italie peut aussi faire partie du trio de tête avec Mahmood, un jeune auteur-compositeur qui fait déjà son chemin dans la péninsule, avec son titre « Soldi ». Mi pop, mi rap, le texte sombre et la voix incisive de l’artiste permettent aux Italiens d'y croire, même si Matteo Salvini aurait préféré un candidat plus lisse et moins typé.

Les résultats de l’Eurovision seront une chose mais quels titres aurons-nous envie d'écouter dans la voiture  sur la route des vacances. Souvenons-nous de l’été  2016 et d’Amir dont la chanson « J’ai Cherché » et son gentillet refrain avait alors fait le bonheur des radios.

Mon top 5. De la pop, de l’électro, de la nostalgie et surtout de la personnalité. Et bien sûr, un petit côté décalé. 

N°1 – Leonora « Love is Forever » (Danemark) un coquet petit bijou avec à la clé quelques mots en français. Une mise-en-scène très comédie musicale. Décontracté, juste craquant lorsqu'elle reprend dans notre langue "L'amour est pour toujours..." un message qu'une jeune Danoise envoie entr'autres à ceux qui dans notre pays ne se nourrissent plus que de colère et de haine.



N°2Zala Kraj et Casper Santi «  Sebi » (Slovénie)  Un duo fusionnel. Entièrement chanté en Slovène, le titre mêle poésie et mélancolie dans un décor résolument dépouillé. La voix flottante de Zala percute autant que l'orchestration synthé aux accents aériens envoûtants. Une véritable révélation dans une langue totalement inspirante.


N°3Chingiz « Truth » (Azerbaïdjan) une amplitude vocale assez impressionnante et un rythme efficace. Sur scène, une première partie d'une belle originalité. Les Azeris ont du style, c'est certain.



N°4Lake Malawi « Friend of a Friend » (République Tchèque) un clin d’œil aux années 80. Très plaisant a écouter et à regarder. Frais, sautillant, le genre de chanson sans prétention qui rend les gens heureux.


N°5KeiiNO « Spirit of the Sky » (Norvège) De la pop dans la tradition avec un soupçon de piment qui fait la différence. Le sami, cette langue venu du fonds des âges parlée par les peuples du grand Nord scandinave s'invite dans la chanson, apportant une dimension supplémentaire à ce titre déjà fort bien structuré.   


Et que le meilleur gagne ! Allez Bilal, on est derrière vous.
Il y a fort à parier que les jurys vont plébisciter quelques chansons qui risquent vite de se détacher. Mais lesquelles? Slaves, scandinaves, latines, germaniques, caucasiennes? On le saura demain dans la nuit.



















jeudi 2 mai 2019

La REM, et maintenant rebondir

Les Gilets Jaunes, tout au moins ce qu’il en reste, n’ont pas apprécié les annonces du Président. Ce n’est pas un scoop, on le savait déjà même avant qu’Emmanuel Macron ne prenne la parole. La seule chose qui importait pour eux était qu’il accepte d'instaurer le RIC. Sachant que ce référendum n’a d’autre but affiché que la question de sa révocation, il était évident que le Président de la République n’allait pas céder à un diktat de la rue risquant de remettre en cause des fondements même de nos institutions. 

LFI ou l'art et la manière de rattraper le train en marche
Or, contrairement à ce que prétendent les Gilets Jaunes, il les a toutefois bien entendus et étudié leur revendication. Il y a même répondu en proposant d’assouplir les règles du RIP, ce référendum d’initiative partagé figurant dans la Constitution mais extrêmement difficile à mettre en place en raison du nombre bien trop élevé de signataires permettant d’enclencher sa procédure. Emmanuel Macron a proposé de ramener leur nombre jusqu’ici fixé à 4,5 millions à seulement 1 million. Ce chiffre tout à fait raisonnable va, on ne peut plus, dans le sens de la demande des Gilets Jaunes, même si vu leur si petit nombre, il leur faudra autrement argumenter pour attirer à eux des centaines de milliers de « référendosceptiques ». Le problème est que pour valider la mise en place du RIP, il est nécessaire d’obtenir en amont l’approbation d’au moins 185 députés ou sénateurs, ni plus ni moins que des élus de la République, une engeance qui donne des boutons de fièvre aux Gilets Jaunes. Ils n’en veulent pas parce que leur logiciel exige la mise en place d’une démocratie directe, c’est-à-dire sans élus, une "populocratie", en somme. Au cas où on l’aurait oublié, ils sont opposés à la démocratie dite représentative, c’est-à-dire qu’ils dénient à des élus même légitimes le droit de voter les lois à leur place. 
Dans l’esprit des Gilets Jaunes, il y a un exécutif, issu de l'oligarchie, qui propose et l’assemblée du peuple qui dispose par oui ou par non. On n'est pas vraiment dans la nuance. Nous sommes là dans un processus totalement nouveau, une liquidation pure et simple de la république telle que nous la vivons au profit d’un système qui, s’il est instauré, conduira de façon inéluctable à la désagrégation du pays et à la guerre civile. Les Français ont, pour une part, un a priori favorable envers les Gilets Jaunes en qui ils ont vu les porte-parole de leur propre détresse existentielle et financière mais sont-ils allés jusqu’à adhérer à leur projet de société ? Rien n’est moins sûr.

La France en Marche. Ce n'est surtout pas le moment de s'arrêter, malgré le
les pièges et la dure loi de l'infox
Le mouvement s’étiole inexorablement. Il faut être décidément dur d’oreille pour ne pas vouloir entendre les réponses que le gouvernement a déjà apportées ou sur lesquelles il continue de travailler. Peut-être n’est-il pas, non plus, inutile de rappeler à tous ceux qui lui ont reproché ce qu’ils ont perçu comme de l’arrogance et du mépris qu’Emmanuel Macron s’est livré, lors de sa conférence de presse, à un large mea culpa, souhaitant par-là retisser le lien rompu avec beaucoup de ses concitoyens. Faut-il y répondre par le mépris ? Ah ! le mépris ! cette spécificité française avec laquelle on traite tout ce qui semble contrarier un orgueil de classe bâtis dans les luttes, que l’on soit syndiqué ou de tradition bourgeoise. D’aucuns pourront dire qu’il a surtout convaincu les convaincus. Mais heureusement ! imaginons un instant qu’il ait déçu ses propres troupes. Est-il parvenu, pour autant, à ratisser plus large ? A entendre les oppositions, non. Le contraire eût été étonnant. Il existe cependant une frange d’indécis, ceux que l’on pourrait appeler les « swing voters », ceux-là mêmes qui font pencher la balance à droite ou à gauche. C’est de ce côté-là que l’horizon peut s’éclaircir pour le chef de l’Etat. La balle est dans son camp. Il apparaît déjà que le président peut désormais compter sur son socle de partisans, un pourcentage de 22 à 24% d’électeurs qui semble résister contre vents et marées.  

Ce socle manque toutefois de visibilité. Il est composite, sans assise, sans passé. Il s’est agrégé autour d’une vision rajeunie de la France, jouissant dans sa spontanéité d’une popularité explosive. La victoire d’En Marche s’est faite sur un espoir à la limite de l’irrationnel mais ses effets se sont rapidement dissipés faute de posséder l’appareil susceptible de la relayer et de l’entretenir. Comment comparer la toute jeune et inexpérimentée équipe de la République en Marche avec les cellules militantes communistes, socialistes ou gaullistes, parfaitement rodées depuis parfois cinq générations dans l’art de porter la parole des chefs auprès de la population, sans sourciller ni même arrière-pensée critique, autant au pouvoir que dans l’opposition. C’est surtout dans la difficulté et lorsque surgissent les problèmes qu’on apprécie d’ordinaire la faculté des adhérents d'un parti à manier les éléments de langage propres à faire avaler les pilules. 

En cas d'élection, il n'y a pas à faire la fine bouche.
Le marché est toujours l'endroit où il faut se montrer
La conquête du pouvoir par Emmanuel Macron a bénéficié d’un tel alignement des planètes qu’on a cru qu’après les six jours symboliques qui lui avaient permis de bâtir sa victoire, le septième lui aurait accordé un repos bien mérité. La grasse matinée n’a, cependant, guère duré et le répit espéré n’a pas eu lieu. C’est à ce moment que notre président, si brillamment élu, s’est retrouvé seul, faute d’avoir à sa disposition un appareil politique digne de ce nom avec ses instances nationales, départementales jusqu’à ses petites mains de terrain. N'oublions pas la presse, aucun journal qui ne soit prêt à défendre la politique du nouveau président. Aux USA, les Démocrates peuvent compter sur le soutien indéfectible du New-York Times et du Washington Post, les Républicains sur celui de Fox News. En France, même si les oppositions ont eu tôt fait de montrer du doigt la complicité des médias envers Emmanuel Macron, il suffit de parcourir la presse au quotidien pour se rendre compte qu'il ne dispose en fait d'aucun soutien inconditionnel de quelque journal que ce soit.

Malgré cela, la REM  a rallié beaucoup de monde, mais des gens mobilisés sur Internet sans se connaître les uns les autres. Apprendre à se connaître, à se reconnaître au sein de mêmes valeurs, à se mobiliser ensemble pour défendre un projet politique, ne pas hésiter à entrer dans la controverse et s’en nourrir, maîtriser l’argumentaire nécessaire face à des opposants organisés, distribuer des tracts en assénant les mots qu’il faut pour répondre aux  reproches, tel est le rôle du militant de base. 

Force est cependant d’admettre qu’après le triomphe de 2017, la situation s’est compliquée en 2 ans et que notre gouvernement n’est pas exempt d’erreurs de parcours. La faute à qui ? Uniquement par manque de maturité politique, par une sorte de fatuité ou du sentiment de toute puissance qu’offre le pouvoir, même en démocratie. Tous à la République en Marche viennent du Centre, de la droite ou de la gauche, ont même pour certains été encartés, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas des « rookies » en politique mais ils ont été incapables de trouver les mots justes pour répondre à la crise qui sourdait à l’automne dernier. Pour la bonne raison, et c’est peut-être le problème fondamental de la Macronie, que la culture politique de adhérents de la REM est multiple, parfois même contradictoire. Comment, en fait, trouver une harmonie positive entre un ancien militant du RPR et un ex du PS, unis certes sous la bannière d’Emmanuel Macron mais issus de cultures jusque-là totalement antagonistes. C’est un challenge mais il ne s’agît que d’une étape. Lors de sa campagne, Emmanuel Macron estimait, avec peut-être trop de confiance que la France était un bloc. Un raccourci trop facile. La France est divisée, fracturée, faute d’avoir profité de la décentralisation pour instaurer un Etat de type fédéral. Non, la France, cher Emmanuel n’est pas un bloc mais une mosaïque de blocs qui se côtoient, s’ignorent ou se méprisent les uns les autres. 
  
Le cas type de la décision imposée par Paris.
Une erreur de communication à l'origine d'une crise sociale qui n'en
finit plus.
Les Français ont tous en eux quelque chose de James Dean, d'Albert
Camus ou de Fernand Raynaud. C'est proprement dans leurs gênes.
Gouverner c’est prévoir, certes, mais la température du terrain est un indicateur indispensable à la mise en place de telle ou telle décision. Inutile de revenir sur la hausse de la Taxe Carbone alors que tout le monde, surtout dans nos campagnes, savait que les 80km/h étaient vécus comme une punition infligée par un pouvoir métropolitain qui profite des larges subventions accordées aux transports en commun, à une bande de péquenots aux semelles boueuses qui en sont encore à rouler dans de vieux diesels polluants. Lorsqu’Elisabeth Borne a annoncé devant Jean-Jacques Bourdin, avec toute la froide assurance d’une technocrate matricée par le discours monolithique du service public, moins au service du vrai public que de lui-même, que l’augmentation de la Taxe Carbone correspondait à une trajectoire qui en annonçait d’autres, il était patent qu’on courait à la catastrophe. 3 semaines plus tard, les Gilets Jaunes entamaient leur interminable périple. Ou est passée la République en Marche alors que la crise se profilait à grand pas ? Aux abonnés absents. Dans un contexte aussi tendu, les partis classiques auraient envoyé leurs militants expliquer le pourquoi du comment. Or, comme la plupart des Français, le petit monde de la Macronie a assisté, tétanisé, à l’éclosion spontanée de ce mouvement totalement improbable et protéiforme des Gilets Jaunes, pour la plupart des abstentionnistes invétérés soudain séduits par les charmes de la vie de la démocratie, qui s’est répandu comme une traînée de poudre à travers le pays. 

Chers amis de la République en Marche, le pire péché en politique est de douter de ses engagements, de ressentir un sentiment d’échec dès qu’il faut se frotter à des oppositions dont le discours est d’autant plus facilité qu’elles n’exercent aucun pouvoir. Cessons pour une fois de confondre la com. et la vraie vie. Il est vital que soit établie une porosité constante entre les lieux de décision et les oreilles au contact du terrain. 
La République en Marche a pour double rôle d’être d’un côté l’oreille du président à l’écoute de tout ce que peuvent dire les Français au sujet de la manière dont sont conduites les affaires du pays mais aussi son porte-voix pour expliquer et valoriser ses décisions.

Une chose est sûre, la Russie de Vladimir Poutine
fait partie du nouvel ADN du RN

La campagne des Européennes vient de commencer et une fois encore, ce sont des problèmes purement internes à la France qui risquent de se retrouver dans les urnes. Oublions Jean-Luc Mélenchon qui voulait faire de l’élection un référendum anti-Macron avant de se crasher lui-même mais on entend toutes les oppositions classiques ne pas dire autre chose. On veut se payer la tête de Macron envers et contre tout. Dans le registre des dépeceurs de la REM, le Rassemblement National gagne indiscutablement des points, apparaissant comme le parti qui profiterait, en fait, de toutes les mesures exigées par les Gilets Jaunes écartées par le Président, que ce soit le RIC ou la proportionnelle intégrale. Que d’égard envers Marine Le Pen, celle-là même qui s’est affiché avec Vladimir Poutine pour montrer à quel point sa vision de l’Europe dépend de ce qu’en a décidé le Kremlin. Elle a, à son crédit de n’avoir aucune responsabilité gouvernementale, de vivre en somme dans le confort de l’opposition dans un pays où celle-ci n’est pas muselée, contrairement à la Russie, un pays qui lui sert pourtant de modèle et d’appui. Elle n'est en France pas la seule à avoir les yeux rivés sur la Volga. La France Insoumise n'a jamais caché sa volonté de renégocier les Traités Européens pour faciliter un rapprochement avec la patrie du Bolchévisme. 


Les élections européennes se jouent à la proportionnelle pure, c’est-à-dire qu’à partir de 5% de voix, tous les partis auront des élus. Nous avons d’un côté les Européistes, qui pensent que les pays qui composent ce continent peuvent avoir un projet commun. Mais, nul n’ignore à moins de s’être téléporté vers les très inhospitalières Iles Mac Donald qu’il y a un moment où il faut entrer de plain pied dans le XXIème siècle. Si l’on en croit les défenseurs de l’Europe des frontières, tout irait pour le mieux, chacun derrière ses volets, s’observant de loin à travers ses persiennes, soupçonneux, pire, suspicieux. Une façon en somme de tirer un trait définitif sur le projet d'un continent enfin uni malgré sa formidable multiplicité linguistique et enfin capable de jouer d'égal à égal avec les 3 empires planétaires. 
    
Et dans tout cela, la République en Marche ? Européenne à « fond », surement mais qu’est-ce que la République en Marche pour l’Europe ? Aux grands maux, les grands remèdes comme à chaque fois. Face aux Nationalistes dont le seul but est de démanteler l’Union Européenne pour mieux l’inféoder aux velléités expansionnistes de Moscou auxquels tous les plus grands promoteurs de l’Europe des Nations n’ont pas caché leur allégeance, les Européistes convaincus vont devoir batailler ferme au Parlement Européen. Le Rassemblement National est persuadé que les électeurs français lui donneront suffisamment de légitimité pour abattre l’Union Européenne. Malgré leurs divisions, les Français accepteront-ils de se laisser manipuler par ceux qui, au nom du « populisme », instrumentalisent en fait le peuple au profit de leurs propres intérêts, bien éloignés des vraies causes nationales. C’est tout ce qu’il faut espérer même si nous sommes toujours au milieu du gué.

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