Dans ce monde où les tentations autoritaires sont plus à
l’ordre du jour que jamais pour les pouvoirs en place, il nous arrive aussi de
bonnes nouvelles. Tant qu’il restera une once de démocratie dans les pays où le
peuple a encore voix au chapitre, demeurera aussi l’espoir que celui-ci refuse
de se laisser submerger par la vague redoutée des populistes de tous bords.
Au
moment où, en France, les derniers sondages laissent présager d’une prochaine
arrivée de l’extrême-droite aux plus hautes fonctions de l’Etat, d’autres pays
viennent d’exprimer leur ras-le-bol de la corruption des dirigeants et leur
lassitude des mensonges que diffusent les milieux nationalistes dans l’unique
but d’attiser les peurs et les haines.
Brexit, passé le temps de l'euphorie L'atterrissage s'avère à haut risque faute d'avoir encore un pilote dans l'avion |
L’exemple britannique saute tout de
suite aux yeux même si la corruption ne fait plus partie des gênes de sa classe
politique depuis bien longtemps. Mais c’est surtout en raison des grossiers
mensonges de ceux qui voulaient bouter le Royaume Uni hors de l’Union
Européenne que nos amis d’Outre Manche sont aujourd’hui totalement désemparés,
pour ne pas dire dégoûtés. Ils se sont rendu compte que le référendum sur la sortie
de l’Union Européenne n’a été qu’une gigantesque manipulation à coup de
fake-news dont ils ont été les dindons de la farce. Dans quel état d’esprit
peut-on ensuite se retrouver après avoir été littéralement roulé dans la farine.
Les Parlementaires l'ont depuis bien compris mais ne savent plus comment
trouver la solution pour dire stop. Un Brexit avec accord ou sans accord, tout
cela commence à faire peur. Il a suffi de voir à Londres la micro-manifestation
des pro-Brexit au soir du 29 mars pour comprendre que le long de la Tamise, de
la Severn, de la Tyne et même de la Tweed, on ne veut plus partir. Partir pour
où, d’ailleurs ? C’est bien là le problème. Un problème d’autant plus aigü
que du côté d’Edinbourg, il suffirait d’une étincelle pour que l’Ecosse décide
de rester dans l’Union Européenne et que le bleu de St Andrews disparaisse de
l’Union Jack. Et si l’Ulster faisait de même ?
Les querelles politiques, une tradition britannique Qu'ils se battent, qu'ils s'invectivent, qu'ils se chamaillent mais qu'ils se gardent bien de larguer les amarres |
Tragedy ! chantaient
les Bee Gees. Tragédie en effet, inconcevable. Le Brexit était un fantasme mais
comme tous les fantasmes, il n’engendre que de la déception s’il devient réalité.
Que l’Angleterre reste finalement dans l’Europe unie est en tout cas, tout ce
qu’on peut lui souhaiter car si l’Europe est la pire des solutions, il n’y en a
pas de meilleure. Ils sont en France et notamment dans ma région des milliers
de citoyens britanniques à avoir demandé la naturalisation depuis l’annonce du
Brexit. Mais pour moi qui suis Français de souche, un sous-chien comme ils
disent, un amoureux invétéré comme tant de Français de cette Merry Old England,
de Mr Pickwick, de Beatrix Potter, Charlotte Brontë ou Mary Shelley, de ses paysages, de son histoire, de sa
littérature, de ses peintres fabuleux à l’instar d’un Edwin Landseer ou William
Hogarth, et de ses gens avec lesquels nous partageons ensemble la même histoire
mêlant comme dans un vieux couple le meilleur autant que le pire, l’idée de
voir le Royaume Uni se replier derrière un nouveau mur d’Offa serait comme une
pénitence sans absolution. Je ne retiendrai qu’une image de cette alliance qui
unit les sangs anglais et français, celle du drapeau du roi Edouard III, écartelé au lion anglais et à la fleur de lys. Le Brexit aura-t-il lieu, c’est un peu la
Guerre de Troie de notre temps, un sitcom, une saga, bref, une torride histoire d'amour entre les frogs et les rosbeefs.
Zuzana Caputova, avocate militante écologiste Et si l'Europe commençait par la Slovaquie |
Zuzana Caputova, vous connaissez ? Pas encore ?
C’est elle qui vient d’être élue Présidente de la Slovaquie. Et alors ? Disons qu'à force de ne voir le monde qu’en gilet jaune, vous en oubliez que la Terre
tourne toujours autour du soleil et qu’il s’y passe aussi des choses. Quel pays
que la Slovaquie, petit certes mais quelle belle aventure, allez-y c’est un
vrai paradis. Bâillonné du temps de l’Empire Austro-Hongrois, aliéné de force
aux Tchèques par le Traité de Versailles, ce pays en majorité catholique né en
1992 de la chute de l’URSS est enfin parvenu à affirmer son identité, grâce à
l’Union Européenne, n’en déplaise à certains. Membre du Groupe de Visegrad, que l'extrême-droite s'est empressée de récupérer comme union souverainiste, alors
que ce fut pour les pays d’Europe orientale un moyen de se protéger contre les
ultimes soubresauts de feue l’Union Soviétique, la Slovaquie vient d’élire à sa
tête une avocate, militante écologiste anti-corruption en réponse à l’onde de
choc qui a suivi dans le pays l’assassinat crapuleux du journaliste Jan Kuciak
et de sa compagne alors qu’il enquêtait sur les liens entre la maffia et le
pouvoir. Réussira-t-elle, c’est une autre histoire mais en ces temps incertains
où les extrêmes surfent sur les faiblesses inhérentes aux démocraties quand
elles ont en face des régimes qui se moquent du pluralisme, il ne serait pas
dénué de raison qu’elle aille trouver un premier soutien auprès des pays qui ne
renoncent pas à l’idée d’une Europe unie. Un grand bravo au peuple slovaque qui
a osé dire non aux populistes soutenus entre autres par une Eglise catholique
décidément plus loin que jamais du camp du bien.
L’élection ukrainienne, à présent. Un nouvel épisode du
dégagisme qui s’est emparé des peuples, pressés dès qu’ils sont consultés de
dire non à la corruption qui n’en finit plus de gangréner les milieux
politiques, comme si les bons sentiments affichés n’étaient que de la poudre
aux yeux ou de l’enfumage. Les urnes, dès lors qu’elles ne sont pas trafiquées,
bourrées ou détruites délivrent un verdict sans appel. A Kiev, Viktor
Porochenko, le président sortant ne récolte que 18% des voix au premier tour de
l’élection, laissant la majorité à Volodymyr Zelenski, un comédien trentenaire
surtout connu pour avoir interprété dans une série télé un jeune président
arrivé à la tête de l’Ukraine par hasard. Ironie du destin, la fiction devient
réalité. Ne bénéficiant d’aucune expérience politique, et risquant de ne pas
sortir indemne des luttes intestines qui rongent les organes du pouvoir, il
incarne le mécontentement et la volonté de mettre à bas la classe
politique qui a failli avant même d’apporter un semblant de solution à la crise
économique. Le constat est en effet cinglant. Malgré son énorme potentiel, l'Ukraine ne parvient toujours
pas à s’extirper du syndrome qui frappe de malédiction les anciennes république de l'URSS, asphyxié par le frère siamois
russe qui lui colle au corps autant qu'animée par son désir immodéré de passer à l’ouest pour de
bon. Est-ce que Zelenski, s’il est élu parviendra à trouver le bon compromis,
rien n’est sûr mais une chose est certaine, c’est que le soleil se lève à l’Est
de l’Europe et qu’il ne faudrait pas que par lâcheté ou paresse, on fasse
preuve de poltronnerie face aux « Big Blue Eyes » de la Moscova.
En Turquie, Erdogan vient de se prendre une gifle. Quel
Européen, même le plus partisan de l’intégration de la république ottomane à
l’Union Européenne ne peut pas y voir là une lueur d’espoir tant on a crû patent
le basculement de notre partenaire de l’OTAN vers les chemins boueux de
l’obscurantisme islamiste. Les Turcs ont, comme bon nombre de citoyens
européens, les oreilles farcies des discours va-t-en guerre de certains de leurs gouvernants, l’un au nom de la défense d’un continent historiquement chrétien,
l’autre animé par la volonté d’instaurer la charia, cette loi inquisitoriale
dont s’inspire la mafia pour régler ses différends. Les électeurs turcs ont dit
assez. Le président Recip Tayyep Erdogan, islamiste revendiqué, vient de perdre
la capitale Ankara ainsi que la grande ville côtière d’Antalya et il ne fait
aucun doute qu’il va perdre aussi Istanbul. On comprend que pour lui, le camouflet est tel qu'il imagine une fraude massive, y voyant la main d'une force occulte qui aurait, par miracle, survécu aux épurations massives qui ont nettoyé l'administration, l'armée et la police de toute opposition, même la plus timide. Vexé par un revers électoral frappant de plein fouet son idéal totalitaire mais logique envers lui-même, Erdogan ne pourra plus se fixer comme mission que d'épurer son propre peuple, devenant en somme un nouveau Pol Pot avec Allah comme excuse. A l'école des dictateurs, il reste toujours une place à prendre dans la galerie des horreurs. Staline et Hitler y ont pensé avant lui mais à l'ère des réseaux sociaux, l'affaire est mal engagée. Peu dûpes, les Turcs sont allés jusqu’au
bout de ce qu’ils pouvaient supporter dans le mensonge, l’intox et la
corruption comme mode de gouvernement. Le message envoyé est certes sans
ambiguïté mais le chemin est malheureusement encore long avant que la Turquie
ne renoue avec la laïcité telle que l’avait édicté son grand leader Mustapha
Kemal.
Espérons toutefois, en attendant, que la Turquie ne soit plus seulement
éclairée par un croissant de lune mais que les électeurs d’Istanbul chassent les janissaires
d’Erdogan de Sainte Sophie, cette basilique que ces derniers haïssent tant elle
leur rappelle à chaque jour qui passe que leur Dieu est arrivé le dernier sur
la liste. Merci au peuple turc de renouer avec un bien meilleur destin que
celui qui consiste à faire croire que la Terre est aussi plate qu’une pâte à
brick.
Et l’Algérie ? Pendant combien de temps encore le peuple
va-t-il souffrir d'anesthésie, laissant aux commandes le terrible clan des
Tlemceniens qui se partage à lui seul tous les pouvoirs depuis l’indépendance
du pays en 1962. L’Algérie n’ayant jamais été une démocratie telle qu'on la
conçoit en Europe, le régime qui gouverne depuis déjà trop longtemps dans l’opacité
la plus totale parvient toutefois à se donner le temps d’inventer la
parade fatale propre à replonger le peuple algérien dans un nouveau coma
prolongé. Après le réveil brutal qu'a engendré l’espoir de conduire le président
Bouteflika au cimetière de la patrie reconnaissante, la clique du FLN et ses
alliés s’active en coulisse pour qu’au final rien ne change et que chacun, au palais d'El Madouria, continue de faire ses petites affaires.
On pourra, pour le coup, savourer une bonne coupe de
moutaï à Pékin après avoir vu, dans un premier temps, défiler avec inquiétude, à travers toute l’Algérie, des millions de jeunes en quête d'émancipation. Avec la disparition de Bouteflika et la nomination d’un
nouveau gouvernement, copie conforme du précédent et des autres avant lui, les
Chinois sont désormais rassurés et le petit monde des arrangements entre amis retrouve le
sourire. L’Algérie devra encore atteindre la fin d’un nouvel hiver, après déjà
tant d’hivers.
Les voilà, les vrais ennemis de la Pologne : les magiciens qui détournent le peuple de la vraie foi aux illusions |
Changeons à présent de lattitude et arrêtons-nous un moment sur les bords parsemés de pâquerettes de la Vistule. Est-ce que les Polonais vont enfin se réveiller ? Pas sûr mais c’est
encore possible. Ce pays si cher au cœur des Français depuis qu’Henri III en
avait été le roi éphémère, ému à l'évocation de de Marie Leczinska, Tadeusz Kosciuszko, Marie Walevska et bien sur Frédéric Chopin, a trop longtemps souffert de son grand voisin russe
pour pouvoir se passer du réconfort de son intégration à l’Union Européenne. Peut-être
d’ailleurs, ses dirigeants devraient-il cesser de faire la fine bouche en
accordant autant d’importance à la protection que leur assure l’OTAN contre les
hypothétiques menaces que feraient peser sur eux les chars de Vladimir Poutine
au lieu de reconnaître les avantages conséquents que leur accorde Bruxelles en matière
de développement économique et de soutien à l’agriculture.
Les Polonais agitent
le spectre de l’Islam migratoire pour conforter leurs idéaux nationalistes alors même que
rares sont les musulmans qui osent s’aventurer sur leur sol. Ils seraient, en
revanche, bien plus inspirés d’adresser un regard critique envers l’Eglise
catholique qui profite de son emprise sur la société pour y injecter un poison obscurantiste comparable à celui qu'emploient les imams chez leurs voisins d’Europe occidentale. On apprend en
effet que de prêtres ont mis en scène un autodafé au cours duquel ont été brûlés
des volumes d’Harry Potter et de Twilight Zone, porteurs selon eux de messages subversifs diffusant la magie du diable. On peut rire de ce genre d’initiative
mais on est aussi en droit de se demander si on n’est pas, non plus, revenu en plein
Moyen-Âge au temps où l’on brûlait vifs les hérétiques. On
sait ce qui s’est passé dans les années 30 en Allemagne où l’on a commencé par brûler les livres
issus de la pensée des Lumières avant de brûler des hommes, des femmes et des
enfants. La violence des mots précède toujours la violence des actes, on en a
tous les samedis la preuve avec les Gilets Jaunes, dernier avatar né du mariage des idées du NSDAP et des Camise Negre.
Que les prêtres polonais qui se permettent de condamner des œuvres
littéraires dont la seule prétention est de divertir des lecteurs épris de
rêve et d’aventure se demandent si en matière de magie, ce ne sont pas eux
les grands manipulateurs des âmes, laissant croire qu'ils sont les seuls autorisés à accomplir un miracle, chaque fois qu’ils parviennent par enchantement à réduire le Dieu Tout Puissant maître
de l’Univers à une vulgaire langue de chat, euh, pardon ! une
hostie. Quelle prouesse, en effet, plus fort que de la magie, en fait rien de plus que de la divination comme les prêtres de l'Egypte Antique savaient si bien le faire, just an illusion pour fidèles crédules ! Quand
l’humain et le divin se croisent, cela donne le Corps du Christ. Désolé mais le
cannibalisme de l’eucharistie n'est pour moi pas différent de la consanguinité légitimée par la papauté à la cour de la très
catholique Espagne, de l’inceste biblique selon Loth et ses filles, ou de la pédophilie ramenée à un désir infantile selon la catéchèse du diocèse de Lyon, ce à quoi je réponds définitivement no ! no !
no ! no ! no ! et no!
Dans moins de deux mois, les Européens vont être amenés à élire
leur Parlement. On sait qu’il ne dispose pas de tous les pouvoirs et que la chambre
des députés de Strasbourg est peu de chose comparée à la puissante Chambre des
Représentants Américaine. Cette élection a cependant une importance
considérable tant elle va modeler ce que sera la politique de l’Union Européenne au cours des
cinq années qui viennent. Les populistes de droite et de gauche veulent la
démanteler, la faire disparaître, prétendant que l’avenir de chacun réside d’abord
dans sa capacité à fermer ses frontières, à vivre en autarcie, à refuser en
fait, la globalisation pourtant inéluctable de l'économie au profit de la renaissance d’un
marché intérieur autosuffisant, sauf à signer des accords de libre-échange avec des pays comme le Brésil, la Chine (toujours elle) ou peut-être la Russie. Ils devraient prendre exemple sur le Royaume
Uni qui vient de tenter l’expérience et s’en mord à présent doublement les
doigts.
L'Europe comme en rêvent les populistes |
Chers concitoyens de l’Union, comprenez que le démembrement de notre
continent est le vœu que formulent sans même s'en cacher les Etats-Unis de Donald Trump, la Chine de Xi-Ji-Ping
et la Russie de Vladimir Poutine. Ceux qui assènent des propos nationalistes et
xénophobes ne sont que les émissaires volontaires ou non de ces trois grands
puissances. Ils prétendent vouloir la sauvegarde de l’Europe alors qu’ils en préparent
le cercueil. Nos frontières entre états européens ne sont que des lignes, comme
celles qui séparent les départements entre eux. Il est passé le temps des
rideaux de fer. Mesdames et Messieurs, vous tous le peuple d’Europe, uni dans la même histoire et par essence condamné au même destin, vous triompherez des
populistes comme, à la fin, le bien triomphe toujours du mal.
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