dimanche 20 janvier 2019

Un mal profond qui vient de loin

Un pays qui ne sait plus où est sa route, divaguant de droite et de gauche entre l’ancien et le nouveau siècle, prêt à verser dans le fossé faute de trouver refuge dans les vestiges du monde d’avant. Telle est la France d’aujourd’hui. Pathétique !
Après avoir si longtemps repoussé les échéances fatales et joué les autruches face à l’échec patent de leur système redistributif, les Français viennent d’atterrir dans un nuage de souffre après avoir cru avec opiniâtreté et un brin de légèreté en des lendemains qui chantent. 
L’illusion a si bien et si durablement fonctionné que l’on s’est habitué à croire que nous possédions de manière inaltérable le meilleur système social au monde, un modèle que tous nos partenaires auraient dû nous envier. L’Etat Providence a bâti, année après année, un extravagant système de "Mécano" au bénéfice du plus grand nombre, créant de façon presque perverse le sentiment qu’il suffisait de demander pour recevoir. Doit-on y voir simplement un manque de clairvoyance ou d’anticipation ? Certes non, il y a assurément une forme sournoise de démagogie à penser que distribuer sans compter répond à une exigence morale, donc légitime. 

Saint Martin de Tours
figure populaire de l'iconographie chrétienne
Il a partagé son manteau avec un pauvre
Quelle action louable, en effet, que de partager son manteau pour l’offrir aux pauvres mais que dire s’il s’agit du manteau d’un autre. Et cet autre n’est ni plus ni moins que le gentil contribuable, ce Français trop pauvre pour optimiser, trop riche pour avoir droit à quoique ce soit, juste bon à se faire plumer. C’est pourtant lui qui a payé le manteau mais il se l’est tout bonnement fait voler. La France peut toujours se targuer d’être un paradis social, elle n’a plus rien d’un exemple pour ses voisins européens. Paradis social et enfer fiscal à la fois. Le côté obscur de la médaille. 
On peut mener une politique sociale audacieuse mais encore faut-il savoir agir en Pater Familias, c’est-à-dire en bon.ne père.mère de famille, économe, responsable, prévoyant.e. Tout ce qui a manqué, en fait, à nos politiques. Les gènes de la gouvernance française n’ont malheureusement jamais été formatés qu’à partir du postulat selon lequel « je dépense, donc je taxe. Je taxe, donc je dépense ». On se souvient de l’improbable cagnotte de Jacques Chirac, un excédent venu de nulle part dont d’aucuns s’étaient empressés de voir comment on allait vite pouvoir le dépenser. La cagnotte n’était, en fait, rien de plus qu’une erreur de calcul.

Soyons sérieux, pour une fois. Il y a quelque chose de pourri en République de France, et ce depuis bon nombre d’années. Comment peut-on, en même temps, s’honorer du titre de champion du monde toutes catégories en matière d’impôts, de taxes et de prélèvements obligatoires et, au bout du compte, constater à quel point notre pays manque de moyens pour tout. Drôle de pays en effet que celui qui possède une fiscalité de mammouth et ne peut même pas s’occuper dignement de ses services publics. S’il doit y avoir un débat, c’est bien celui-là : où passe notre argent ? Des chiffres, il nous faut des chiffres, poste par poste, point par point; il faut comprendre le pourquoi du comment. Nous devons savoir ce qu’on fait de notre argent, à l’Euro près. 

A force de noyer le poisson, de faire comme si tout va bien, d’endormir les Français, est arrivé le moment où la goutte d’eau a fait déborder l’océan. Payer oui, il le faut bien, notre pays nous offre beaucoup de choses, peut-être sommes-nous même de gros privilégiés mais il n’y a rien de pire que le flou pour instiller le doute, motiver la crainte, attiser la défiance, générer la révolte. Toutes les révoltes sont nées de levées d’impôts abusives, de taxes scélérates n’ayant eu d’autre but que de rémunérer les agents chargés de les collecter. C’est à la suite de ces combinaisons tordues qu’en 1776, les Etats-Unis ont proclamé leur indépendance en réponse à l’instauration par le roi George du Stamp Act, un droit de timbre sur les échanges de marchandises entre les colonies, un véritable étouffoir, pire une camisole de force imposée par Londres sur le commerce.  

La France, il faut avoir le courage de le dire, est dans un état d’urgence absolue. Nul ne conteste les chiffres hallucinants de la dépense publique, de quoi donner le tournis. Or, cela ne semble n'être pas suffisant, tout le monde se plaint, on manque partout de moyens. Il y a forcément un loup. 
Regardons de plus près. Le poste le plus onéreux concerne les retraites. Ce serait donc le bouquet car les retraités n’ont pas digéré la hausse de la CSG alors que ce sont eux qui coûtent le plus cher au pays. Bon Dieu, mais c’est bien sûr, le système de solidarité que l’on nous vend depuis presque trois générations n’est en fait qu’une gigantesque tromperie, une véritable Pyramide de Ponzi qui ne fonctionne qu’avec la contribution de nouveaux entrants, toujours plus d’entrants, encore et encore, jusqu’à ce que le château de cartes s’effondre et que comme pour Bernard Madoff, ce soit la case prison. 
Ce sont les actifs qui payent pour ceux qui ne le sont plus et qui, eux-mêmes ont payé pour ceux d’avant. A l’instar de la pyramide, il faut toujours de plus en plus d’actifs sauf que ce sont les retraités qui sont de plus en plus nombreux. Pour compenser les failles criantes du système, c’est l’Etat qui doit emprunter. Ce qui revient à dire que les retraités qui pensent avoir suffisamment cotisé pour vivre de vieux jours heureux se sont fait abuser. 
La France des années 50
La retraite n'était pas un problème. La solidarité était avant tout une histoire de famille
Les caisses de retraite ne sont pas la Caisse d’Epargne. Et voilà qu’on commence à découvrir un des fondements du mal français, la dictature du social. Les retraites constituent le gros de la dépense sociale, un coût bien plus élevé que dans tous les autres pays. Or, les retraités allemands, hollandais, danois, anglais, américains ou encore canadiens ne semblent pas si malheureux que cela sans pour autant ruiner les caisses de leur pays. Le problème français est simple: on ne choisit pas à quelle sauce être mangé, on y est contraint. Le système de cotisation français est imposé, obligatoire, étatisé. Il est interdit de sortir du régime établi, hormis prendre une assurance complémentaire en prélèvement de son revenu net, quelque chose qui n'est pas permis à tout le monde. 
Participant d’un système de solidarité, la retraite par répartition échappe au retraité autant qu’à l’actif cotisant, elle est gérée par l’Etat tout comme l’est l’Assurance Maladie. Dans les autres pays fonctionnent les Fonds de Pension, des organismes privés un peu vite considérés en France comme le diable alors qu’ils ne font que défendre les intérêts de leurs souscripteurs. Ce sont eux qui versent à ces derniers leurs pensions de retraite. Pour ce faire, n’étant bien sur aucunement bénéficiaires de taxes, redevances et autres impôts, il leur faut en permanence investir les sommes qui leur sont confiées pour dégager des ressources. Peut-être sont-ils le dernier avatar du capitalisme mais ce ne sont pas eux qui vident les caisses de la nation. 
En France, on a choisi de figer la société dans une configuration héritée de la Libération, avec une espérance de vie qui, alors n’atteignait pas les 70 ans pour un âge de départ à la retraite à 65 ans. Un différentiel de 5 ans ! Il n’y avait alors aucun risque à faire payer les retraites par les actifs, tant le taux de chômage était au plus bas. Il n’échappe à personne que les choses ont depuis bien changé. Ajoutons à cela que certaines corporations pour la plupart rattachées à l’Etat ont réussi à se faire accorder des régimes spéciaux comme autant de nouveaux privilèges puisés dans le budget tandis que l’âge de la retraite a été ramené à 60 ans. 
La 4CV, symbole d'un pays qui s'offrait ses premières vacances
Etant donné l’augmentation de l’espérance de vie, aujourd’hui supérieure à 80 ans, le différentiel est passé à 20 ans. En conclusion, le poids des retraites ne cesse de s’accroître au point de devenir une véritable bombe à retardement. En effet, au moment où la génération du Baby-Boum fait massivement valoir ses droits à la retraite, le risque d’implosion de la société française n’a jamais été aussi proche. Il est temps de changer le système des retraites. Il est urgent que l’Etat transfère une partie de la charge au privé et qu’on en finisse, dans ce pays qui ne parvient toujours pas à rompre mentalement le cordon ombilical avec les idéaux socialo-communistes des années 50, avec cette horreur culturelle du privé. Le privé reste pour les Français un monde dominé par des patrons despotiques qui ne cherchent qu’à s’enrichir sur les dos de leurs salariés. Le secteur privé a en revanche, une obligation, celle de faire des bénéfices, une condition essentielle à sa survie. Une entreprise privée ne peut se permettre de perdre de l’argent sauf à se retrouver rapidement liquidée avec tout ce que cela comporte de conséquences sociales. Pour les thuriféraires du tout Etat, il est évident que la notion même de bénéfice est une injure. Mon Dieu ! cachez ce bilan que je ne saurais voir ! Trêve d’idéologie, il n’est que temps de faire preuve de pragmatisme et se donner un peu d’air. Que l'Etat conserve le régime général, soit, mais il est temps qu'il transfère au privé les caisses complémentaires en les faisant progressivement passer du système de répartition à celui de capitalisation. Un étalement sur dix ans pourrait s'effectuer sans douleur.  
Il y a malheureusement fort à parier qu’on ne changera rien à la trajectoire suicidaire dans laquelle le pays s’est engagé. Comme l’a dit le Président Macron, la France n’est pas un pays comme les autres. Effectivement, elle s'obstine à rouler à contresens.        

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